Alsharq Tribune-M-Essam
L'économiste suisse Stefan Legge juge la politique des droits de douane de l'administration américaine de "conflictuelle", mettant en garde contre ses répercussions sur les marchés mondiaux.
Les objectifs déclarés par le président américain Donald Trump lorsqu'il a annoncé les soi-disant "droits de douane réciproques" visant les partenaires commerciaux sont en grande partie inaccessibles, car ils sont conflictuels, a estimé le professeur d'économie et chef du département de politique fiscale et commerciale à l'Université de Saint-Gall en Suisse, lors d'une récente interview accordée à Xinhua.
M. Legge a expliqué que, d'une part, M. Trump veut utiliser ces droits de douane comme levier pour contraindre des changements politiques à l'étranger et conclure des accords qu'il considère comme bénéfiques pour les Etats-Unis. D'autre part, il cherche également à atteindre des objectifs économiques tels que la génération de revenus et le renforcement des entreprises américaines grâce à l'imposition effective de ces droits de douane.
Cela signifie que ces derniers ne sont pas seulement une menace, ils doivent de fait être imposés, ce qui mine leur efficacité en tant que leviers, a-t-il poursuivi, soulignant là une contradiction fondamentale dans la logique de cette politique.
Les droits de douane américains ont eu des effets d'entraînement sur les marchés mondiaux, a noté M. Legge. Ainsi, les entreprises ont précipité leurs expéditions vers les Etats-Unis en prévision de nouveaux droits de douane plus tôt cette année, provoquant des pics d'exportation à court terme suivis de baisses.
"Nous voyons donc beaucoup d'instabilité et de turbulence, mais la plus grande chose est l'incertitude," a dit l'économiste.
Selon lui, cette incertitude ne dissuade pas seulement les exportations et les investissements, mais s'étend également bien au-delà des droits de douane pour saper les relations entre les Etats-Unis et l'Europe.
"Il est difficile de traiter avec des pays ou des entreprises peu fiables", a jugé Stefan Legge. "Je pense qu'en Europe, nous devons nous demander dans quelle mesure les Etats-Unis sont un acteur fiable".
L'imprévisibilité des Etats-Unis dans ses politiques commerciales et ses négociations a poussé l'Europe à renforcer ses liens avec d'autres partenaires, a-t-il noté.
M. Legge a ainsi notamment souligné l'importance et le potentiel de la coopération Europe-Chine, saluant la transformation économique de la Chine ces dernières décennies
Selon lui, de nombreuses personnes en Suisse sont désireuses de passer aux véhicules électriques, mais font face à des défis liés aux batteries et à la recharge. Les entreprises chinoises, a-t-il ajouté, ont réalisé des progrès significatifs dans ce domaine. "Nous voulons en bénéficier," a souhaité M. Legge.
A son avis, les décideurs suisses sont devenus de plus en plus pragmatiques quant au commerce et à la collaboration avec la Chine ces dernières années, ce qu'il considère comme un développement positif.
L'expert suisse croit que les pays devraient donner la priorité à la collaboration pratique pour aborder des problèmes communs tels que le changement climatique, la biodiversité et le progrès économique.
"Donc, je pense que nous devrions poursuivre le dialogue, renforcer la collaboration et nous assurer que nous tirons parti de l'échange mutuel de biens, de services, d'idées et de personnes", a conclu M. Legge.